Privatiser la République, c’est la rétrécir

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Se caractérisant par sa transversalité, la République ne saurait être l’appropriation d’un parti politique. Un parti politique est un creuset discriminant. Et c’est bien normal. En revanche, la République n’est pas libérale, elle n’est pas interventionniste, ni sociale, ni progressiste, elle ne défend pas une laïcité qui écrase les religions. Elle est bien plus puisqu’elle consacre la synthèse de plusieurs siècles de l’histoire de notre nation. Vouloir enfermer la République autour d’idées programmatiques consacre le rétrécissement de celle-ci.

La République est un bien en partage. Tenter une définition de la République serait vain tant la plasticité de l’objet est infinie. De 1789, nous gardons les éléments constituants que sont la liberté, la vertu et la raison. Le retour au peuple qu’exige l’idée républicaine peut reposer sur la démocratie, mais la République ne lui est pas conforme. La vision gaullienne de la République est un modèle dont personne ne conteste, de gauche comme de droite, la pérennité et la stabilité. La République française se distingue également par son approche de la laïcité. L’adaptation nécessaire face au nouveau monde ne doit pas amener à des résonances faciles : les repas de substitution ne sont pas antirépublicains. La cohésion d’un peuple se construit par l’acceptation de l’autre qui n’est pas un ennemi ou un déviant par principe. L’élection du Président de la République au suffrage universel et l’outil du référendum nous distinguent des Américains et cultivent une pratique républicaine à part en France.

En choisissant « les Républicains » comme dénomination, le principal parti d’opposition va privatiser un patrimoine commun à l’ensemble de notre pays. Cet enfermement n’aidera pas à clarifier les principes historiques de la France alors même que nous avons de plus en plus besoin de les rappeler, de les partager, de les défendre. Pas de les dévoyer. Rappelons-nous qui défendait la République durant les moments graves de l’histoire ? Ce sont plutôt des minorités qui se sont d’abord levées contre le coup d’Etat du 2 décembre 1851, au temps du boulangisme, face à l’antidreyfusisme, contre le régime de Vichy. Si l’ambition est de partager la République avec le plus grand nombre de Françaises et Français, le cadre s’appelle la Nation française et l’adhésion de son peuple.

S’attarder sur le nom d’un parti politique apparaît inutile tant que le contenu n’est pas défini. Et c’est bien ce à quoi nous devons nous employer rapidement plus que de mener des débats sémantiques. Une nouvelle génération d’élus est née à droite lors des élections municipales et départementales. Une génération qui refuse le cumul des mandats, qui s’inspire de nouvelles méthodes pour de nouvelles pratiques politiques. C’est déjà une nouvelle approche de la République qui est proposée, sans qu’elle soit dictée par le haut. Ce premier défi des idées, l’Union des Jeunes pour le Progrès participera à le relever et l’a déjà proposé à Nicolas Sarkozy. Cette énergie retrouvée par plusieurs victoires électorales ne doit pas nous empêcher de penser un nouveau modèle pour la France et permettre de conquérir l’alternance. Qu’importe l’emballage si rien n’est changé à l’intérieur.

Tribune de Rudolph Granier dans l‘Opinion, le 27 avril 2015

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